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AFP - Autocensure, manque de réseau, ou encore gestion compliquée de la vie professionnelle et familiale: même si l'envie et les idées sont là, les femmes sont nettement moins nombreuses que les hommes à créer des entreprises.

Paris, 4 fév 2016 - Autocensure, manque de réseau, ou encore gestion compliquée de la vie professionnelle et familiale: même si l'envie et les idées sont là, les femmes sont nettement moins nombreuses que les hommes à créer des entreprises.

"En termes d'entrepreneuriat au féminin, nous sommes les premiers en Europe", s'est félicitée jeudi Pascale Boistard, secrétaire d'Etat aux Droits des femmes, lors d'une conférence au Salon des entrepreneurs à Paris.

Pour autant, un écart important demeure en France entre les hommes et les femmes en matière de création d'entreprises. "Aujourd'hui, on en est à presque 35% de femmes entrepreneurs en France", a indiqué Mme Boistard, rappelant que le gouvernement avait pour objectif de faire évoluer cette part à 40% d'ici à fin 2017.

Autre indicateur témoignant de ces disparités: selon l'Indice entrepreneurial français, réalisé notamment par l'Agence pour la création de l'emploi (APCE) avec le soutien de Pôle Emploi, 27% des femmes ont été placées d'une manière ou d'une autre dans une dynamique entrepreneuriale, contre 38% des hommes.

Les femmes sont en outre sous-représentées dans certains secteurs, comme "dans les entreprises high-tech où il y a une forte composante innovante", a souligné lors de la conférence Géraldine Welter, directrice adjointe du département Economie et Cohésion sociale à la Caisse des dépôts.

A l'inverse, elles sont sur-représentées dans certains autres secteurs. En 2015, elles étaient "majoritaires dans la +santé humaine et action sociale+ (72 %) et les +autres services aux ménages+ (64%)", selon l'Insee.

Selon Mme Welter, "cette situation évolue un peu trop lentement" et il est "urgent" de lever les freins en la matière. Même si le premier obstacle, selon elle, demeure "l'autocensure".

- Manque de confiance -

"Les femmes ont moins confiance en elles", confirme Bernadette Sozet, déléguée générale d'Initiative France, un réseau d'accompagnement à la création d'entreprise.

"Elles veulent être très bien formées, ont besoin de se rassurer et d'être sûres qu'elles sauront tout maîtriser" avant de se lancer, explique-t-elle à l'AFP.

"Les hommes foncent plus, tandis que les femmes vont étudier le terrain et être beaucoup plus prudentes", renchérit Coralie Louvrier, chargée de mission chez Action'elles, un autre réseau qui accompagne environ 500 femmes dans leurs projets en leur proposant des formations et des contacts pour leurs réseaux.

Par ailleurs, "elles disent souvent qu'elles ont des petits projets, ont tendance à se décrédibiliser", raconte-t-elle.

Alors qu'à l'inverse, pour réussir dans son projet, il faut voir grand, souligne Odile Dussaucy, fondatrice de messortiesculture.com, un site référençant les visites guidées à travers la France. Et "à partir du moment où on ressent que c'est le moment de créer son entreprise, on arrive à lever toutes les barrières", d'une manière ou d'une autre, témoigne cette chef d'entreprise volontaire.

Deuxième obstacle, le financement. Les femmes "osent moins emprunter", souligne Mme Sozet. Une appréhension liée notamment au fait qu'elles disposent souvent de moins d'apport que les hommes.

"Les femmes ont souvent des salaires moins importants", observe la responsable, qui pointe aussi du doigt "le regard du banquier". "Si un homme crée une entreprise, on ne lui demande pas le métier de sa femme ni qui va garder les enfants", dit-elle.

"La crédibilité auprès des banques est toujours plus difficile à obtenir pour les femmes", a convenu Pascale Boistard.

Enfin, les femmes s'engagent moins car "c'est souvent sur elles que repose la gestion de la maison et des enfants", note Bernadette Sozet. Or, diriger une entreprise exige beaucoup d'heures de travail et d'investissement dans la vie sociale, notamment pour parvenir à se constituer un réseau.

Pour Mme Sozet, s'intéresser plus à l'entrepreneuriat féminin dans les quartiers populaires doit être "un des axes de l'Agence France Entrepreneur", annoncée en octobre par le président François Hollande et chargée de promouvoir le développement des entreprises dans des territoires en difficulté.